Pourquoi les médias signent des accords avec l’intelligence artificielle : le cas Le Monde × Perplexity

À l’heure où les assistants intelligents redéfinissent notre manière d’accéder à l’information, de nombreux groupes de presse choisissent d’intégrer l’intelligence artificielle à leur stratégie éditoriale. L’objectif ? Sécuriser l’utilisation de leurs contenus tout en explorant de nouveaux modèles économiques et gagner en visibilité auprès d’un public connecté.
Le dernier exemple en date : Le Monde, journal français de référence, a signé en mai 2025 un partenariat ambitieux avec Perplexity.ai, une start-up californienne spécialisée dans la recherche augmentée. Ce nouvel accord illustre une tendance de fond : celle d’un rapprochement entre les médias traditionnels et les grands modèles de langage IA.
Le partenariat Le Monde et Perplexity : les grandes lignes
Un accord inédit et ciblé sur les usages
Contrairement à l’accord passé en 2024 entre Le Monde et OpenAI, celui avec Perplexity se distingue par une approche plus encadrée :
- Utilisation des articles uniquement dans les réponses générées (et non pour l’entraînement du modèle d’IA).
- Mention systématique de la source, avec lien direct vers l’article d’origine.
- Accès exclusif au contenu via Sonar, un assistant en langage naturel disponible sur LeMonde.fr et l’application mobile, prévu pour juin 2025.
Ce type d’intégration garantit la traçabilité de l’information et renforce la confiance des utilisateurs dans les réponses fournies par l’IA.
Pourquoi les médias s’allient-ils aux IA génératives ?
1. Protéger les contenus et encadrer leur usage
Dans un contexte où les IA génératives peuvent aspirer et réutiliser des textes sans autorisation, les éditeurs cherchent à reprendre la main sur leurs archives. En signant des accords avec des acteurs comme Perplexity ou OpenAI, ils s’assurent :
- De maîtriser l’utilisation de leurs articles,
- D’éviter l’entraînement sauvage des modèles sur leurs données,
- Et de bénéficier d’un retour sur investissement par la rémunération associée.
2. Générer des revenus alternatifs avec les IA
Le partenariat Le Monde × Perplexity repose sur un modèle proche des droits voisins : chaque consultation d’un contenu via l’IA entraîne une rémunération proportionnelle, parfois couplée à un partage des revenus publicitaires générés.
Cette démarche pourrait préfigurer un nouveau modèle économique pour les médias à l’heure où les revenus traditionnels (abonnement, publicité classique) s’essoufflent.
3. Gagner en visibilité auprès des utilisateurs d’IA
Un autre enjeu crucial : l’élargissement de l’audience. En intégrant leurs contenus dans des moteurs IA comme Perplexity, les médias :
- Atteignent un public jeune et technophile,
- Améliorent leur référencement dans les réponses générées,
- Et donnent plus de poids à leurs éditions en langues étrangères (par exemple, la version anglaise du Monde).
Exemples d’autres médias ayant signé des accords avec les IA
Une dynamique mondiale d’alliances IA-médias
Le Monde n’est pas un cas isolé. Plusieurs grands titres internationaux ont sauté le pas pour sécuriser et monétiser l’usage de leurs contenus par les IA :
- Der Spiegel, El País et Time Magazine ont ouvert leurs archives à Perplexity, avec un système de partage au clic.
- The Los Angeles Times et The Independent participent à un programme de transparence des sources, garantissant la mention des articles consultés.
- Springer fournit à OpenAI des extraits scientifiques à usage académique, dans le cadre d’un test auprès d’universités.
- En France, Numerama a rejoint Perplexity avec un modèle de rétribution proportionnelle.
Quels avantages pour les éditeurs de presse ?
Une maîtrise renforcée du droit d’auteur
L’un des piliers de ces accords est la protection des droits de propriété intellectuelle. Les médias partenaires conservent :
- Le contrôle de l’utilisation de leurs contenus par les IA,
- Un droit à rémunération pour chaque usage,
- Et la possibilité de retrait ou de restriction, si les termes de l’accord ne sont pas respectés.
Une opportunité pour tester l’avenir du journalisme
Ces collaborations permettent aux rédactions de :
- Innover dans les formats de diffusion,
- Tester des assistants personnalisés (comme Sonar du Monde),
- Et proposer des expériences enrichies aux lecteurs, grâce à des recommandations d’articles ciblées par l’IA.
Les défis à venir : transparence, impact et rentabilité
Une visibilité réelle à confirmer
Même si les accords promettent une mise en avant des articles sources, la transparence de l’affichage dans les réponses générées reste à surveiller. Perplexity va-t-il effectivement favoriser ses partenaires dans ses réponses ? Les utilisateurs cliqueront-ils sur les sources ?
Ces questions seront cruciales pour évaluer l’efficacité réelle de ces alliances à moyen terme.
Vers un nouveau modèle économique des médias ?
Avec la baisse des revenus publicitaires traditionnels, ces partenariats médias-IA pourraient devenir une source majeure de monétisation. Mais le chemin reste incertain : tout dépendra de la capacité des IA à drainer un trafic qualifié vers les sites d’actualités… et à en garantir une juste rétribution.
Conclusion : une alliance entre journalisme et technologie
Le partenariat entre Le Monde et Perplexity.ai marque un tournant dans l’évolution des relations entre les médias et les intelligences artificielles. Il illustre la volonté des éditeurs de :
- Protéger leurs contenus face aux usages non autorisés,
- Explorer de nouveaux leviers de revenus via les IA génératives,
- Et renforcer leur visibilité dans un écosystème informationnel bouleversé.
À l’avenir, la réussite de ces accords dépendra de leur capacité à créer de la valeur pour toutes les parties : les lecteurs, les rédactions, et les fournisseurs d’intelligence artificielle.
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