Intelligence artificielle et crise énergétique : une explosion de la demande électrique d’ici 2030

La révolution de l’intelligence artificielle (IA) transforme nos sociétés à une vitesse fulgurante. Mais cette avancée technologique majeure s’accompagne d’un revers de la médaille de plus en plus visible : une explosion de la consommation énergétique. D’après le dernier rapport annuel de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la demande électrique liée à l’IA pourrait être multipliée par quatre d’ici 2030, si les tendances actuelles se poursuivent.
En 2024, la consommation mondiale d’énergie a enregistré une augmentation de 2,2 %, soit le double de la moyenne annuelle des dix dernières années (1,3 % entre 2013 et 2023). Cette hausse est notamment alimentée par plusieurs facteurs :
- des températures mondiales record,
- une demande accrue en climatisation,
- l’électrification des transports,
- la croissance de l’activité industrielle,
- et surtout, l’essor des centres de données alimentant les systèmes d’intelligence artificielle.
🧠 IA et data centers : un duo énergivore
Les infrastructures qui soutiennent l’IA, en particulier les data centers, sont extrêmement gourmandes en énergie. Le fonctionnement continu de ces centres exige une alimentation électrique massive, à la fois pour traiter les données et pour refroidir les machines.
Selon Flavien Astraud, ingénieur R&D chez ITS Integra, un décalage alarmant existe entre les discours des acteurs du numérique, qui promettent sobriété et écologie, et la réalité de leur consommation. « Le contraste entre les engagements de sobriété affichés et la réalité des courbes de consommation est frappant », résume-t-il.
🔋 La demande électrique de l’IA en Europe équivaut à 35 réacteurs nucléaires
L’échelle de la demande énergétique est vertigineuse. En Europe, l’intelligence artificielle consommerait déjà 35 gigawatts (GW), selon Marlène de Bank, ingénieure au think tank The Shift Project. Pour donner un ordre de grandeur, 1 GW équivaut à la production d’un réacteur nucléaire. Cela signifie qu’il faudrait théoriquement construire 35 nouveaux réacteurs pour répondre à la seule demande énergétique de l’IA sur le continent.
Ce constat pose un défi majeur à l’heure où l’Union européenne s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 55 % d’ici 2030 par rapport à 1990, et à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.
🌱 Un paradoxe entre transition numérique et transition écologique
Ce déséquilibre entre les objectifs climatiques et l’augmentation effrénée de la consommation énergétique suscite l’inquiétude de nombreux experts. L’AIE appelle à une réaction urgente des gouvernements pour encadrer le développement énergétique de l’IA et le rendre compatible avec les engagements climatiques.
La question centrale devient donc : au service de quoi mettons-nous l’intelligence artificielle ?
🚲 IA responsable : une question de choix d’usage
Comme le souligne Marlène de Bank, l’usage que nous faisons de l’IA est comparable à celui d’un véhicule. « Pour faire un kilomètre, tu peux prendre la voiture, ou le vélo. Tes émissions annuelles dépendent de combien de fois tu choisis l’un ou l’autre. L’IA, c’est pareil. Tu peux l’utiliser à bon escient ou l’utiliser excessivement. »
Cette analogie souligne la nécessité d’un usage raisonné et réfléchi de l’intelligence artificielle, en évitant le recours systématique à des modèles puissants pour des tâches qui peuvent être réalisées autrement, voire manuellement.
💡 Vers une intelligence artificielle éco-efficiente ?
Face à cette situation, plusieurs pistes de solution émergent pour réconcilier innovation technologique et sobriété énergétique :
Optimisation des algorithmes
Développer des modèles d’IA plus légers, moins gourmands en ressources, et tout aussi performants.
Utilisation d’énergies renouvelables
Alimenter les centres de données avec de l’énergie solaire, éolienne ou hydraulique pour réduire leur empreinte carbone.
Réglementation et quotas énergétiques
Mettre en place des normes strictes pour limiter la consommation énergétique des entreprises technologiques.
Sensibilisation à l’usage raisonné
Informer les entreprises, les développeurs et le grand public sur l’impact environnemental de l’IA pour encourager des usages responsables.
🧭 Conclusion : une révolution à encadrer pour un avenir durable
L’intelligence artificielle est une opportunité inédite pour améliorer la productivité, résoudre des problèmes complexes et transformer nos économies. Mais son développement doit impérativement s’accompagner d’une réflexion globale sur son impact environnemental.
La transition numérique ne pourra être durable que si elle va de pair avec la transition énergétique. Cela implique des choix technologiques éclairés, une meilleure efficacité énergétique et une volonté politique forte pour encadrer les usages de l’IA.
Sans cela, le risque est grand que les bénéfices apportés par l’intelligence artificielle soient éclipsés par une crise énergétique aggravée.
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