Pourquoi Meta alimente son IA avec de l’énergie nucléaire : une stratégie que la France aurait rêvé d’inspirer

Face aux besoins énergétiques colossaux générés par l’intelligence artificielle (IA), les géants de la tech revoient leur stratégie d’approvisionnement énergétique. Dernière illustration en date : Meta (maison mère de Facebook, Instagram et WhatsApp) a signé un accord historique avec Constellation Energy, une société américaine spécialisée dans la production d’électricité nucléaire. Objectif : alimenter ses data centers gourmands en énergie via le réacteur nucléaire Clinton Clean Energy Center, situé dans l’Illinois.
Avec ce contrat de 20 ans, Meta s’assure une source stable, décarbonée et continue d’électricité pour soutenir ses projets d’IA. Ce choix stratégique confirme une tendance émergente chez les GAFAM : s’affranchir des énergies fossiles au profit de solutions durables à haute capacité.
🇫🇷 Une victoire symbolique… mais pour les États-Unis
Ironiquement, cette décision s’inscrit dans la vision promue par Emmanuel Macron, fervent défenseur de l’énergie nucléaire comme levier d’attractivité pour la France. Depuis 2020, le président a multiplié les déclarations sur le rôle stratégique du nucléaire dans l’économie numérique et la transition énergétique.
Lors du Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle organisé à Paris en février dernier, il déclarait :
« La France est l’un des rares pays où les exploitants de data centers peuvent sécuriser un accès fiable et abordable à une électricité décarbonée, grâce à l’atout unique de notre parc nucléaire. »
Un discours aux antipodes du « Drill, baby, drill » de Donald Trump, qui prônait encore récemment les énergies fossiles.
Mais dans les faits, ce sont les États-Unis qui capitalisent sur ce virage énergétique en séduisant les géants du numérique avec une régulation plus souple et un écosystème propice à l’innovation nucléaire.
💡 Microsoft, Google, OpenAI… tous séduits par l’atome
Meta n’est pas seul dans cette course au nucléaire. D’autres entreprises de la tech ont également franchi le pas :
Microsoft relance un réacteur historique
En septembre dernier, Microsoft a annoncé un accord avec la centrale nucléaire de Three Mile Island, tristement célèbre pour l’accident de 1979. L’idée ? Relancer un réacteur mis à l’arrêt depuis 2019, dont le démantèlement complet n’était prévu qu’à l’horizon 2079. Cette décision symbolise la volonté de Microsoft d’avoir une maîtrise directe sur son alimentation énergétique.
Des mini-réacteurs aux réacteurs à fusion : les paris technologiques des GAFAM
Selon un rapport de l’Institut de Recherches Internationales et Stratégiques (IRIS), plusieurs entreprises comme Oracle, Meta et Microsoft ont investi des centaines de millions de dollars dans des projets de mini-réacteurs nucléaires modulaires (SMR). Ces installations, plus compactes et plus flexibles que les centrales traditionnelles, sont idéales pour une implantation proche des centres de données.
OpenAI, la société derrière ChatGPT, explore une voie encore plus ambitieuse : la fusion nucléaire. Elle a notamment pris des participations dans Helion Energy, une start-up californienne qui promet une énergie propre, illimitée, sans les déchets radioactifs générés par la fission.
Google mise aussi sur le nucléaire bas carbone
Michael Terrell, directeur de l’énergie et du climat chez Google, résume parfaitement la logique actuelle :
« L’énergie nucléaire est décarbonée, stable et économiquement viable. Elle peut fonctionner 24h/24 et s’impose comme une solution incontournable face aux défis énergétiques de l’IA. »
⚡ Le besoin énergétique explosif de l’intelligence artificielle
Avec l’essor des modèles d’intelligence artificielle de type GPT-4, Gemini ou LLaMA, la consommation énergétique des data centers atteint des sommets. Chaque prompt, chaque calcul, chaque image générée nécessite des puissances de calcul colossales. Selon des estimations récentes, les besoins énergétiques liés à l’IA pourraient doubler d’ici 2030.
Cette nouvelle réalité pousse les entreprises à chercher des sources d’énergie continues, propres et prévisibles. Le nucléaire, longtemps délaissé au profit des énergies renouvelables, revient donc sur le devant de la scène comme une solution stratégique.
🇫🇷 L’atout nucléaire français menacé de perdre son avance ?
Emmanuel Macron avait pourtant vu juste : le nucléaire est un avantage comparatif unique. Mais face à la réactivité américaine et à l’investissement privé massif des GAFAM, la France pourrait perdre sa longueur d’avance.
Le programme Choose France, lancé en 2018 pour attirer les investissements étrangers, visait notamment à mettre en avant cet atout énergétique. Toutefois, comme le souligne le rapport de l’IRIS, les géants américains ne se contentent plus d’être de simples consommateurs d’énergie : ils deviennent eux-mêmes producteurs.
En construisant ou relançant leurs propres réacteurs, ils s’émancipent des fournisseurs publics, contrôlent leurs coûts et s’adaptent plus vite à leurs besoins spécifiques.
🌍 Vers une mutation du marché mondial de l’énergie
Ce changement de paradigme transforme les rapports de force. Si les GAFAM deviennent acteurs de l’énergie, ils pourraient à terme peser dans la régulation, les prix et même la diplomatie énergétique. On voit donc émerger une nouvelle réalité : celle de la convergence entre tech et énergie.
Share this content:
Laisser un commentaire